Megrendelés

Eric Martin[1]: Les racines philosophiques de la notion d'Etat de droit (Annales, 2022., 7-24. o.)

https://doi.org/10.56749/annales.elteajk.2022.lxi.1.7

Abstract

This contribution deals with the philosophic roots of the concept of rule of law in English, French and German legal systems. Whereas the formal and substantial conception of the rule of law appears to derive mainly from Locke's and Kant's works, the strictly formal conception of the rule of law arose later, among German lawyers. The opposition between the two conceptions reflects the more general opposition between philosophical idealism and natural law on one hand, legal positivism on the other hand. In Kant's thought, the formal and substantial conception of the rule of law conveys, more precisely, the philosophical ideal of a State according to the pure principles of right: the empirical States are due to aim at such an ideal. Kant may be therefore regarded, more than any other philosopher, as the real founder of this conception of the rule of law. On the contrary, the strictly formal conception of the rule of law claims an axiological neutrality and an independence of the legal theory from the philosophy of law.

Keywords: rule of law, philosophy of law, legal theory, idealism, natural law, legal positivism, Locke, Kant, Kelsen

Introduction

Deux questions se posent préalablement à toute discussion sur les changements de l'Etat de droit. Tout d'abord, comment l'Etat de droit se définit-il ? Ensuite, est-ce la notion d'Etat de droit elle-même qui est affectée de changements ou bien, plus superficiellement, le régime juridique d'une notion en soi immuable ? La démarche naturelle des juristes est de partir d'une notion qui leur semble faire « consensus », pour en étudier le régime juridique et en développer les implications possibles en droit. Malheureusement, une telle démarche est en l'occurrence sujette à caution. Le contenu annoncé des différentes interventions, françaises comme allemandes, relatives au thème général du symposium, donne en effet l'impression que l'équivoque plane sur la notion même d'Etat de droit. Cela n'est guère étonnant, car les juristes ont eu tendance à l'instrumentaliser, en en exploitant la malléabilité.

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I. Apparition de la notion d'Etat de droit

Une première ébauche de la notion d'Etat de droit peut être découverte dans la philosophie antique. Elle désigne une cité où la puissance politique est soumise à des règles et où, par conséquent, le droit ne se confond pas avec la force. Ainsi Héraclite d'Ephèse insistait-il déjà sur cette idée que la loi doit être défendue, parce qu'elle protège de l'arbitraire du pouvoir, en se servant d'une image : « Il faut que le peuple combatte pour la loi - celle établie - comme pour les remparts »[1]. « L'obscur », comme on le surnommait dans l'Antiquité,[2] entendait signifier par là que, s'il veut survivre, ne pas être écrasé, le peuple doit combattre pour la loi, en la défendant contre ses ennemis ; ennemis soit du dehors, qui voudraient réduire la cité à la servitude, par exemple les perses de Darius, soit de l'intérieur : les tyrans se plaçant au-dessus des lois pour leur substituer leurs décrets arbitraires, démagogues et qui voudraient que le peuple adoptât d'autres lois que celles authentifiées par la tradition, des lois subvertissant les coutumes.[3] Platon, à son tour, écrira que les gouvernants, autres que le politique idéal qui ne se rencontre pas chez les hommes, doivent se faire « les serviteurs » des lois écrites et ne jamais les enfreindre, si toutefois ce sont des lois justes, prises dans l'intérêt commun de l'ensemble de la cité.[4] Selon Aristote, enfin, l'Etat n'étant qu'une association d'êtres égaux et la loi procurant cette égalité, la loi doit être souveraine et les gouvernants doivent en être les serviteurs et les gardiens.[5] Mais, si toutes ces apologies de la loi préfigurent le concept d'Etat de droit, elles sont loin d'en avoir la précision technique que les auteurs modernes s'efforceront de lui donner.

L'expression d'Etat de droit (Rechtsstaat) ne s'est répandue qu'au dix-neuvième siècle, dans la doctrine juridique allemande.[6] Mais sa diffusion avait débuté avant que l'élaboration de la notion ne soit achevée.[7] Aussi a-t-elle immédiatement pâti de son

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ambivalence et de son ambiguïté.[8] Deux conceptions différentes de l'Etat de droit n'ont en effet pas tardé à s'affronter : l'une formelle et matérielle, l'autre exclusivement formelle.[9] Selon la conception formelle et matérielle, apparentée à la rule of law anglo-saxonne, l'Etat de droit est un Etat dont l'organisation juridique est ordonnée à une fin qui la transcende, la sauvegarde de la liberté et de droits subjectifs individuels. D'après la conception formelle, en revanche, l'Etat de droit se caractérise uniquement par un ordre juridique, un règne du droit qui l'oppose à celui de l'arbitraire, quelle que fin que cet ordre poursuive. Bien que la conception formelle soit apparue postérieurement à la conception formelle et matérielle, elle ne l'a pas supplantée. L'une et l'autre coexistent aujourd'hui dans la pensée juridique, si bien qu'on peut parler à juste titre d'une polysémie de la notion d'Etat de droit. John Locke[10] et Emmanuel Kant[11] sont les principales sources philosophiques de la conception formelle et matérielle de l'Etat de droit. Ce sont, en revanche, des juristes allemands du dix-neuvième siècle qui ont théorisé la conception exclusivement formelle de l'Etat de droit.

II. Les deux conceptions antagonistes de l'Etat de droit

D'après Locke, tout d'abord, la République, l'Etat (commonwealth) résulte d'un contrat, par lequel chaque individu convient avec les autres de vivre dans une communauté

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où il vivra en paix et jouira de sa propriété en sécurité.[12] Ce contrat social supposant l'unanimité, la communauté constitue dès lors un corps unique, auquel la volonté et la détermination de la majorité seulement, donne la puissance d'agir comme tel ;[13] et ainsi chaque membre de la communauté s'oblige-t-il à se soumettre à la résolution de la majorité et à être gouverné par elle,[14] en abandonnant tout le pouvoir nécessaire aux fins pour lesquels tous se sont unis en société.[15] Pour autant, l'Etat est susceptible d'emprunter différentes formes de gouvernement, selon que la majorité légifère elle-même ou bien qu'elle investisse soit quelques personnes, soit un roi du pouvoir de légiférer.[16] Ainsi l'Etat peut-il indifféremment consister en une « parfaite démocratie », une oligarchie ou une monarchie, héréditaire ou élective.[17]

Le but de la société civile est donc la préservation de la « propriété »,[18] très incertaine et absolument non sécurisée en l'état de nature.[19] Toutefois le terme « propriété » s'entend largement chez Locke, puisqu'il désigne non seulement la propriété des biens (estate), mais encore la vie et les libertés.[20] L'état de nature est certes gouverné par la loi de nature, obligeant chacun de nous ;[21] la raison, qui est cette loi, nous enseigne qu'étant tous égaux et indépendants, nul ne doit nuire à la vie, la santé ou aux possessions d'autrui.[22] Mais la société civile a vocation à remédier à trois insuffisances de l'Etat de nature, qui expliquent l'aspiration des hommes à le quitter pour vivre dans une société civile, sous l'autorité d'un gouvernement : tout d'abord, l'absence de loi constante, connue et établie d'un commun accord, posant le critère ce qui est correct et incorrect, ainsi que la commune mesure permettant de décider de toutes les controverses à leur sujet ;[23] ensuite, l'absence d'un juge reconnu comme impartial, ayant autorité pour trancher tous les litiges conformément à cette loi;[24] enfin, l'absence d'un pouvoir pour appuyer (back) et soutenir (support) le jugement, lorsqu'il est conforme au droit, et le faire exécuter.[25]

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Or, soutient Locke, ce but de préservation de la propriété au sens large, ne peut être atteint que par l'institution d'un pouvoir législatif comme suprême autorité.[26] Cependant, ce pouvoir législatif n'est pas arbitraire :[27] le gouvernement doit légiférer par des lois constantes, égales pour tous et édictées pour le bien de tous,[28] ordonnées aux fins de la société civile et investir des juges reconnus pour départager les citoyens quant à leurs droits respectifs.[29] Ce n'est en effet qu'à ces conditions que les citoyens sont convenus de renoncer à la liberté de se gouverner eux-mêmes dans l'Etat de nature, pour se placer sous l'autorité d'un gouvernement dans une société civile. Ainsi la loi universelle de nature borne-t-elle la puissance législative.[30] Le pouvoir exécutif, quant à lui, doit être séparé du pouvoir législatif, car si celui qui édicte la loi était celui-là même qui la fait exécuter, on pourrait craindre qu'il ne s'exempte de son application.[31] La tyrannie, enfin, est un exercice du pouvoir au-delà du droit, non dans l'intérêt de tous, mais dans l'intérêt du détenteur du pouvoir, lequel ne fait pas de la loi, mais de sa volonté, la règle.[32] Les composantes essentielles de la rule of law se trouvent déjà dans la philosophie politique de Locke, bien que l'expression n'y figure qu'en filigrane.[33]

Pas plus que Locke l'expression rule of law, Kant n'emploie explicitement l'expression Rechtsstaat.[34] Mais il a été considéré à juste titre, plus encore que le philosophe anglais, comme le précurseur du concept moderne d'Etat de droit. Pour Kant,[35] en effet, l'Etat en général, c'est-à-dire l'Etat idéal, doit être conçu selon les purs principes du droit. Cette idée d'Etat sert de directive à toute assemblée réelle visant à former un Etat. Dans l'Etat de droit kantien, les trois pouvoirs, législatif, exécutif

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et judiciaire sont, comme chez Montesquieu,[36] distingués et séparés.[37] Toujours en s'inspirant de Montesquieu,[38] Kant souligne néanmoins que ces pouvoirs sont coordonnés et subordonnés entre eux.[39] Dans leur union réside en effet, le salut de l'Etat.[40] Mais celui-ci ne s'entend pas d'une fin empirique, telle le bien ou le bonheur du citoyen, comme le pensaient Hobbes ou Locke, qui en avaient, du reste, chacun une acception différente : un Etat qui prétendrait dicter aux citoyens la façon dont ils doivent être heureux serait, souligne Kant, le plus grand des despotismes.[41] Selon Kant, le salut de l'Etat réside dans l'accord entre la constitution et les principes du droit, accord auquel la raison nous fait obligation de tendre par un impératif catégorique.[42] Ainsi l'Etat de droit kantien est-il bien la forme idéale de l'Etat, un modèle que Kant dénomme tantôt une constitution civile,[43] tantôt une constitution républicaine.[44] La conception kantienne de l'Etat de droit peut dès lors être qualifiée de tout à la fois matérielle et formelle.[45]

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Selon Kant,[46] plus précisément, l'Etat en général renferme en soi les trois pouvoirs, c'est-à-dire que l'unité de la volonté générale s'y décompose en trois personnes : le souverain pouvoir - la souveraineté - réside dans la personne du législateur et le pouvoir exécutif, dans la personne de celui qui gouverne conformément à la loi ; quant au pouvoir judiciaire, il attribue à chacun le sien selon la loi, en la personne du juge. Ce dernier jugeant au nom du peuple, le pouvoir exécutif ne saurait se substituer à lui ; il doit se borner à assurer l'exécution des jugements rendus en application de la loi.[47]

Le pouvoir législatif ne peut appartenir qu'à la volonté collective du peuple.[48] En effet, comme c'est de lui que doit procéder tout droit, il ne peut faire par sa loi aucune espèce d'injustice à personne : l'injustice est toujours possible lorsque quelqu'un décide à l'égard d'un autre, mais toute injustice est impossible lorsqu'il décide pour lui-même.[49] Il n'y a donc que la volonté concordante et collective de tous, en tant que chacun décide pour tous et tous pour chacun, qui puisse être législative.[50] Dès lors que, dans la constitution républicaine, le pouvoir législatif exprime ainsi la volonté des citoyens et que le pouvoir exécutif est subordonné à la loi, la forme de gouvernement est obligatoirement représentative.[51] L'acte par lequel les citoyens se constituent en un Etat idéal est, il est vrai, un contrat originaire, par lequel chacun a abandonné sa liberté sauvage et sans loi pour retrouver sa liberté en général dans la dépendance légale de l'état juridique.[52] Mais ce contrat est « une idée de la raison » pratique, et non pas le fondement historique de l'Etat.[53] Aussi le citoyen doit-il obéir au pouvoir législatif existant, quelle qu'en puisse être l'origine.[54]

Les membres de la société civile s'appellent des citoyens et leurs attributs juridiques inséparables de leur nature de citoyens sont :[55] la liberté légale, c'est-à-dire la faculté de n'obéir à d'autre loi qu'à celle à laquelle ils ont consentie ; l'égalité civile, qui consiste à ne reconnaître dans le peuple d'autre supérieur que celui auquel on a aussi bien la faculté morale d'imposer une obligation juridique, qu'il peut lui-même

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obliger;[56] l'indépendance civile, qui consiste à ne devoir son existence et sa conservation qu'à ses propres droits et à ses propres forces, et non à l'arbitre d'un autre. De ces trois attributs juridiques attachés à la qualité de citoyen, le premier, la liberté, est aussi est le plus fondamental, celui dont Kant faisait déjà, dans la Critique de la raison pure,'[57] le fondement de la constitution juste. En effet, l'égalité et l'indépendance civiles, telles que Kant les définit, apparaissent comme les corollaires de la faculté pour le citoyen de n'obéir à d'autres lois que celles auxquelles il a donné son assentiment. La liberté, résume Kant, est le principe et même la condition de toute contrainte nécessaire à une constitution conforme au droit, où la loi commande par elle-même.[58]

L'ascendant de Locke et surtout de Kant est manifeste, au dix-neuvième siècle, chez les juristes allemands, dans leur conception originaire du Rechtsstaat.[59] La notion de Rechtsstaat renvoie alors à un Etat rationnel (Verstandesstaat),[60] un Etat de la raison (Staat der Vernunft),[61] « gouverné exclusivement par la volonté générale et poursuivant exclusivement le bien commun ».[62] Etabli dans l'intérêt de tous, l'Etat a pour fondement légitime la liberté des citoyens, leur égalité et la propriété, qu'il lui appartient de promouvoir et de protéger par les institutions du droit, par la supériorité de la loi, l'indépendance des juges et la participation des citoyens à l'exercice du pouvoir législatif.[63] Cette notion de l'Etat de droit est proche de celle, anglo-saxonne, de rule of law, systématisée par Dicey, sous l'influence notamment de Locke.[64] En effet, la rule of law

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se caractérise par la suprématie de la loi sur l'arbitraire, en premier lieu, la soumission de l'Etat au même régime juridique et juridictionnel que les citoyens, en deuxième lieu, et la protection des droits et libertés individuels par les tribunaux, en troisième lieu.[65] A l'origine, les notions de Rechtsstaat et de rule of law sont donc voisines, ordonnées à des fins identiques.

A la conception formelle et matérielle de l'Etat de droit, d'autres juristes allemands du dix-neuvième siècle ont toutefois opposé une conception uniquement formelle.[66] Selon cette conception, dont Stahl[67] a donné un exposé classique, encore que chantourné,[68] l'Etat de droit ne se définit pas par le but qu'il poursuit ou par son contenu, mais par la manière dont il les réalise. La notion d'Etat de droit n'a pas vocation à tempérer le pouvoir politique en le soumettant à des fins qui lui sont supérieures, mais à soumettre le mode d'action de l'Etat à une légalité formelle, dont des tribunaux indépendants ont pour mission d'assurer le respect.

La conception formelle et matérielle de l'Etat de droit apparaît reçue en droit positif en Europe, malgré, parfois, l'ambiguïté ou l'imprécision des textes. Par exemple, l'article 20, alinéa 3, de la Loi fondamentale de la République fédérale d'Allemagne semble plutôt à se référer à la conception formelle de l'Etat de droit.[69] Mais la doctrine et la jurisprudence allemande en ont déduit les principes de la séparation des pouvoirs et de la protection des droits fondamentaux, en reliant cette disposition à d'autres disposition de la loi fondamentale : son article 1er, alinéas 2 et 3, ses articles 2 et suivants et son article 79, alinéa 3.[70] L'article 2 de la Constitution de la République de Pologne réunit

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lapidairement dans une même proposition la démocratie et l'Etat de droit.[71] Toutefois, cette disposition doit être rapprochée de l'article 10 de cette constitution, qui affirme le principe de la séparation des pouvoirs, et de l'article 30, selon lequel la liberté et les droits de l'homme et du citoyen sont placés sous la protection des pouvoirs publics. Quant aux textes constitutionnels français, ils n'évoquent pas explicitement la notion d'Etat de droit. Cependant, aux termes de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Toute Société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de constitution. » Cette disposition sous-entend que, lorsque tel n'est pas le cas, l'Etat n'est pas un Etat de droit, puisqu'il n'a pas de constitution. Enfin, l'article 2 du traité sur l'Union européenne associe explicitement Etat de droit et liberté dans la même phrase.[72] La jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne se réfère donc logiquement à la conception en partie matérielle de l'Etat de droit, pour enjoindre aux Etats membres de l'Union de la respecter.[73] Dans sa jurisprudence relative à l'interprétation de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la Cour européenne des droits de l'homme procède de même vis-à-vis des Etats signataires de la convention.[74]

III. Difficulte theorique de concept d'Etat de droit

Le talon d'Achille de la conception purement formelle de l'Etat de droit réside dans le cercle vicieux dans lequel elle s'enferme. En effet, pour que l'Etat soit régi par le droit, il lui faut y être assujetti, alors que c'est lui qui le crée par sa volonté. Pour briser ce cercle, des théoriciens allemands comme Jellinek[75] ont eu recours à l'idée d'autolimitation

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(Selbstbeschränkung) de l'Etat : c'est par sa propre volonté que l'Etat s'oblige à respecter le droit (Selbstverpflichtung), dès lors qu'en étant l'origine, il ne peut y être contraint de l'extérieur. Cette thèse sous-entend que l'Etat est soumis à un droit spécial, différent de celui applicable aux particuliers, contraints de respecter le droit sans en être à l'origine. Aussi sert-elle de base au développement du droit administratif.[76] Mais, à l'exception de R. Carré de Malberg, les juristes publicistes français, qui recueilleront à leur tour le concept d'Etat de droit dans la première moitié du vingtième siècle, soutiendront plutôt que le droit limite extérieurement la puissance de l'Etat,[77] quitte à en revenir insidieusement ainsi à un certain jusnaturalisme.[78]

Tout autre est la voie dans laquelle Kelsen s'est engagé.[79] Selon cet auteur, l'Etat se définit comme un ordre juridique organisé,[80] c'est-à-dire un système de normes juridiques, dans lequel la validité de chaque norme se fonde sur une norme hiérarchiquement supérieure (Stufenbau)"[81] car une norme fondamentale (Grundnorm) dont l'existence est présupposée, le prescrit.[82] L'Etat de droit n'est pas un Etat qui, historiquement, créerait un droit pour s'obliger : « le droit règle sa propre création ».[83] L'Etat s'identifie au droit, à telle enseigne que l'Etat peut, comme le roi Midas changeait en or tout ce qu'il touchait,[84] transformer n'importe quel contenu et n'importe quel fin en droit qu'il faut respecter. Aussi l'expression d'Etat de droit est-elle un « pléonasme ».[85] En effet, « Pour autant que l'Etat soit reconnu comme ordre juridique, tout Etat est un Etat de droit ».[86] Dès lors, la théorie de l'autolimitation de l'Etat doit être rejetée, car elle postule une dissociation artificielle entre l'Etat et le

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droit, alors qu'ils se confondent.[87] Seul compte le respect de la hiérarchie des normes, qu'une autorité indépendante doit avoir le pouvoir de faire respecter. Si formelle qu'elle soit, la conception kelsénienne de l'Etat de droit suppose donc une séparation des pouvoirs : une juridiction indépendante doit avoir le pouvoir d'imposer aux pouvoirs législatif et exécutif le respect de la hiérarchie des normes. Elle implique ainsi un contrôle de constitutionnalité, pour imposer ce respect, et non pour protéger les droits fondamentaux.

Bien que, conformément à la théorie pure du droit, tout Etat soit un Etat de droit, Kelsen convient qu'en fait, on emploie cette notion pour désigner un type d'Etat particulier répondant aux postulats de la démocratie et de la sécurité juridique.[88] Mais, selon le juriste autrichien, une telle utilisation du concept d'Etat de droit en constitue un dévoiement, si louable que soit en elle-même la quête d'un idéal de justice. En effet, la théorie pure du droit est « une théorie du droit positif en général » et, pour être pure, précisément, elle doit exclure de son objet tout préjugé relatif à des valeurs, par définition contingentes et subjectives, que le droit devrait poursuivre : elle cherche à répondre à la question de savoir ce qu'est et comment est le droit, non à celle de savoir comment il doit être ou être fait.[89] Peut-être, en écrivant ces lignes au sujet du dévoiement du concept d'Etat de droit, Kelsen avait-il en mémoire un célèbre passage de la Critique de la raison pure:[90] empruntant aux juristes leur distinction familière entre la question de fait (quid facti) et la question de droit (quid juris), Kant y dénonçait l'emploi que nous faisons en fait, d'une foule de concepts empiriques, sans jamais s'interroger sur la légitimité de leur emploi, sans le soumettre à la question quid juris et, partant, sans invoquer aucun principe juridique qui pourrait le justifier. Quoi qu'il en soit, Kelsen a démontré avec force qu'un positivisme juridique rigoureux, en vertu duquel le droit se confond avec l'Etat, vide le concept d'Etat de droit de sens.

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IV. Concept d'Etat de droit et ontologie juridique

La confrontation des analyses respectives de Kant et Kelsen révèle que la conception de l'Etat de droit retenue, formelle et substantielle ou bien strictement formelle, est liée à une ontologie juridique. Elle dépend en effet de la réponse apportée à la question, fondamentale et préalable, de savoir ce qu'est le droit.[91] Pour les juristes positivistes, on le sait, le droit tout entier se réduit aux règles juridiques en vigueur.[92] Sans doute la plupart des juristes positivistes ne se désintéressent-ils pas des « valeurs », qu'un droit a pour but de promouvoir. Mais, tant que le droit en vigueur ne les a pas consacrées, ces valeurs restent, selon eux, en dehors du champ d'application de la science juridique. Toutes les variantes[93] de positivisme juridique se rejoignent ainsi dans l'affirmation de l'exclusivité du droit positif et la négation corrélative de l'existence d'un droit naturel.[94] Or seule la conception exclusivement formelle de l'Etat de droit est, à la rigueur, conciliable avec le positivisme juridique ; à la rigueur seulement, car un positiviste juridique radical comme Kelsen va jusqu'à dénoncer, on l'a vu, un pléonasme dans l'expression d'Etat de droit. La conception matérielle et formelle de l'Etat de droit se réfère, quant à elle, à un modèle idéal et rationnel d'Etat, fondé sur la liberté, l'égalité et la propriété privée. Elle en appelle donc fatalement à des principes de droit naturel, à l'autorité supérieure aux règles de droit positif.

L'examen des écrits de Locke et de Kant le confirme. Selon Locke, tout d'abord, on l'a vu, l'Etat de droit implique la subordination de la loi civile à la loi de nature. Quant à Kant, il emploie le terme de droit naturel (Naturrecht) pour désigner le droit qui repose uniquement sur des principes rationnels a priori, par opposition au droit statutaire, qui procède de la volonté du législateur.[95] Or l'Etat idéal est conçu d'après de purs principes

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du droit.[96] Dès lors, écrit Kant ailleurs, la constitution de cet Etat purement rationnel est de droit naturel[97] ou en harmonie avec le droit naturel.[98] Ainsi, dans la conception formelle et matérielle qui est celle de Kant, l'idéal de l'Etat de droit est-il l'expression du droit naturel.

Nul n'ignore cependant que la notion de droit naturel est bien antérieure à Kant. De nombreux auteurs de l'Antiquité s'y référaient déjà. Toutefois, pour la plupart d'entre eux, la loi naturelle était une loi cosmique, éternelle, immuable et nécessaire.[99] A l'époque moderne, avec l'Ecole du droit de la nature et des gens, puis Hobbes et Locke, la loi naturelle devient un ensemble de règles de conduite découvertes a priori par la raison,[100] perdant ainsi, au passage, son caractère cosmique. Or la notion d'Etat de droit se trouve, à un stade embryonnaire, dans les écrits des représentants de l'Ecole du droit de la nature et des gens,[101] par exemple chez Pufendorf[102] et Wolff.[103] Mais on ne peut les considérer pour autant, comme les fondateurs du concept ; le mérite de son élaboration en revient surtout à Kant.[104] Avec ce dernier, en effet, pour la première fois, le concept d'Etat de droit devient la représentation d'une forme intelligible, d'un idéal politique, à la réalisation duquel la raison pratique nous fait l'obligation morale de tendre.

Le droit naturel de l'Ecole du droit de la nature et des gens constitue un ensemble de préceptes moraux issus de la raison, une forme intelligible au sens platonicien du terme, immuable et éternelle.[105] Il est une vérité universelle et nécessaire, indépendante de toute réalité matérielle.[106] En d'autres termes, Grotius et ses épigones se désintéressent

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du « droit volontaire » ou « droit établi »,[107] qu'ils considèrent comme arbitraire, à la différence du droit naturel, le seul droit véritable selon eux. L'approche de Kant est plus subtile. Contrairement aux représentants de l'Ecole du droit de la nature et des gens, il différencie en effet, pour sa part, soigneusement la légalité et la moralité d'un action,[108] l'action accomplie conformément au devoir et l'action accomplie par devoir.[109] Ainsi le concept de droit se distingue-t-il, selon lui, de celui de vertu,[110] dès lors que la législation juridique fait d'une action un devoir sans intégrer le mobile à la loi, tandis que la législation éthique érige ce devoir en mobile de l'action.[111] Or cette distinction l'amène à associer le concept de droit à la possibilité d'une contrainte externe, contrairement à l'Ecole du droit de la nature et des gens.

Sans doute le concept de droit naturel[112] est-il, pour Kant, un concept a priori, forgé par la raison pure, car un concept déduit de l'expérience n'aurait pas l'universalité et la nécessité que tout concept philosophique suppose:[113] « ce qu'est le droit, l'expérience ne peut nous l'apprendre ».[114] Cependant, Kant définit le droit comme l'ensemble des conditions sous lesquelles l'arbitre de l'un peut être uni à l'arbitre de l'autre selon une loi universelle de liberté.[115] Or il ne peut en aller ainsi que si la contrainte peut être opposée à tout usage de la liberté qui ferait obstacle à la liberté d'autrui. Dès lors, le droit est lié à la faculté de contraindre.[116] Il repose, plus précisément, sur la possibilité d'une contrainte externe pouvant se concilier avec la liberté de chacun suivant des lois universelles.[117] Mais, dans l'état de nature (natürlicher Zustand), nulle contrainte légale,

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publique, extérieure ne protège de la violence d'autrui.[118] Cet état de nature est donc un état de « droit privé », où aucune loi publique n'assurant le respect de la liberté de chacun, du mien et du tien,[119] le droit est provisoire.[120] Le droit ne devient péremptoire que dans l'état juridique (rechtlicher Zustand),[121] soumis au « droit public »,[122] d'une constitution civile ou républicaine.[123] Le mien et le tien y sont alors, en effet, légalement garantis par la contrainte publique, sans pour autant que l'état juridique les fixe et les détermine à proprement parler, puisqu'ils sont reconnus provisoirement en l'état de nature.[124] Cette constitution juridique, déclare Kant,[125] est l'Etat (Staat) au sens véritable. Ainsi, comme on l'a vu antérieurement, la constitution civile ou républicaine est-elle bien en conformité avec le droit naturel, des principes duquel elle assure l'effectivité.

Avant Kant, Locke, il est vrai, on l'a vu, avait déjà jeté les bases philosophiques de l'Etat de droit moderne. Cependant le philosophe anglais a peiné, semble-t-il, à en étayer le concept. Locke est en effet un philosophe empiriste, pour lequel toute connaissance dérive de l'expérience, y compris la loi de nature.[126] Or, reconnaît Locke, le contrat social, par lequel les hommes renoncent à l'Etat de nature pour entrer dans une société civile gouvernée par la volonté générale, n'est qu'une conjecture, et non un fait historique.[127] Ainsi l'Etat de droit ne repose-t-il pas sur un fait d'expérience, comme il le devrait, si seulement Locke appliquait sa théorie de la connaissance ; c'est un simple fait de vraisemblance,[128] nourri de quelques rares récits, soit historiques,[129] soit relatifs à la situation des indiens des tribus d'Amérique.[130] A dire vrai, l'expérience nous enseigne, à rebours, que beaucoup d'Etats civils ne sont pas des Etats de droit tels que Locke en avait tracé les contours. Le statut épistémologique du concept d'Etat de droit chez Locke demeure donc incertain.

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Kant, au contraire, surmonte l'ambiguïté affectant la philosophie politique de Locke, en érigeant l'Etat tel qu'il doit être selon les purs principes du droit, en paradigme que la raison pratique commande d'imiter : « il y a une théorie du droit politique, avec laquelle la pratique doit s'accorder pour être valable ».[131] Ainsi la philosophie critique fonde-t-elle plus que toute autre, à notre avis, le concept moderne d'Etat de droit (Rechtsstaat), au sens formel et matériel du terme. Kant soumet la politique à un idéal de « juridification »,[132] celui de l'état de droit (rechtlicher Zustand) garantissant la liberté à chaque citoyen. « Le droit », écrit-il,[133] « doit être tenu pour sacré à l'homme, si grands soient les sacrifices que cela peut coûter à la puissance qui gouverne. » La constitution juridique parfaite est « la chose en soi » affirme-t-il ailleurs.[134] Elle est, écrit-il encore,[135] un « idéal platonicien (respublica noumenon) »,[136] « la norme éternelle pour toute constitution politique en général ». Cette subordination de la politique au droit permet à Kant de relier sa philosophie du droit à sa philosophie de l'histoire. La soumission des Etats au droit, l'accroissement dans la société de la légalité des actes, sinon de la moralité de leur intention, représente déjà, selon lui, un progrès du genre humain vers le mieux, en lequel la raison peut légitimement espérer, sans pouvoir pour autant le prophétiser.[137] Ce progrès se traduira par une régression de la violence au profit d'une coexistence des libertés, tant dans les rapports entre individus que dans les rapports entre Etats.[138]

V. Conclusion

L'opposition entre la conception formelle et matérielle de l'Etat de droit, d'une part, la conception purement formelle, d'autre part, reflète celle, plus générale, de l'idéalisme juridique et du positivisme juridique. Cependant, l'un comme l'autre ne sont, comme Jean Carbonnier le soulignait,[139] que des tendances générales. Des philosophes aussi différents que Platon et Kant se rangent dans la catégorie des idéalistes juridiques ;

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des penseurs aussi éloignés les uns des autres que les sophistes grecs, tels Protagoras[140] ou Antiphon,[141] d'un côté, Hobbes, de l'autre, dans celle des positivistes juridiques. Aussi un examen des sources les plus directes des deux conceptions opposées de l'Etat de droit a-t-il paru présenter quelque intérêt, encore qu'il se soit nourri de travaux antérieurs approfondis. Il semble résulter de cet examen que la conception formelle et matérielle de l'Etat de droit se fonde sur des valeurs idéales, qu'elle emprunte à Locke et surtout à Kant. Quant à la conception purement formelle, elle postule une neutralité axiologique et témoigne d'une ambition d'autonomie de la science juridique par rapport à la philosophie. Cette seconde conception de l'Etat de droit participe dès lors d'un mouvement plus large d'affranchissement de la science du droit du joug de la philosophie, mouvement dont l'essor remonte au dix-neuvième siècle et qui concerne l'ensemble des sciences humaines.[142] ■

REMARQUES

[1] H. Diels et W. Kranz, Die Fragmente der Vorsokratiker, 6ème éd., vol. 1, (Weidmannsche, Berlin, 1960) B 44 ; D. Laërce, Vies et doctrines des philosophes illustres, trad. M.-O Goulet-Cazé (dir.), Le Livre de poche, IX, 3 : μάχεσθαι χρη τόν δήμοή ύπέρ τού νόμου ύπέρ τού γινομένου οκωσπερ τείχεος ; Héraclite, Fragments (citations et témoignages), prés., trad. et notes J.-F. Pradeau, 2ème éd., (Garnier-Flammarion, 2004) n° 136

[2] Diels et Kranz, Die Fragmente der Vorsokratiker, A la, 3a.

[3] M. Conche, Heraclite : Fragments, 5ème éd., (PUF, coll. Epiméthée, 20ll) 223.

[4] Platon, Les lois, texte et trad. E. Des Places et A. Diès, (Les Belles Lettres, 1951, retirage 2003) IV, 715 b-d ; trad. L. Brisson et J.-F. Pradeau, Garnier-Flammarion, 2006. Cf. A. J. Merkel, Idee und Gestalt des Rechtsstaat, in Festschrift für Hans Kelsen zum 90. Geburtstag, (Franz Deuticke, Wien, 1971) 126140., 131 ; C.-M. Herrera, Quelques remarques à propos de la notion d'Etat de droit, in L'homme et la société, n° 113, Figures actuelles du capitalisme, (L'Harmattan, 1994) 89-103., 93., https://doi.org/10.3406/homso.1994.2754

[5] Aristote, Politique, texte et trad. J. Aubonnet, (Les Belles Lettres, 1971, retirage 2002) livre III, 1287 a ; trad. P. Pellegrin, Garnier-Flammarion, 2015 ; Merkel, Idee und Gestalt des Rechtsstaat, 126-140.

[6] L. Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, thèse, (Dalloz, 2002) n° 28 et suiv.

[7] O. Mayer, Deutsches Verwaltungsrecht, (Duncker und Humblot, Leipzig, 1895) t. 1, 61., cité par Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 89.

[8] Mayer, Deutsches Verwaltungsrecht, 61 ; Herrera, Quelques remarques à propos de la notion d'Etat de droit, 90 ; Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 38 et suiv., n° 67 et suiv., n° 89 ; J. Chevallier, L'Etat de droit, 6ème éd., (LGDJ, Lextenso, 2017) 13 et suiv. ; M. Troper, La théorie du droit, le droit, l'Etat, (PUF, coll. Léviathan, 2001) 267 et suiv. ; J. Rivero, L'Etat moderne peut-il encore être un Etat de droit ?, (1957) Annales de lafaculté de droit de Liège, 65-101., 98.

[9] Telle est la terminologie que retiennent notamment E.-W. Böckenförde [Entstehung und Wandel der Rechtsstaatsbegriff, in Recht, Staat, Freiheit, Studien zur Rechtsphilosophie, Staatstheorie und Verfassungsgeschichte, 2ème éd., (Suhrkamp, Frankfurt, 1992) 143-169 ; trad. O. Jouanjan sous le titre Naissance et développement de la notion d'Etat de droit, in E.-W. Böckenförde, Le droit, l'Etat et la constitution démocratique, trad. O. Jouanjan, W. Zimmer et O. Beaud, (Bruylant et LGDJ, Bruxelles et Paris, 2000) 127-147., 130-132.] et Heuschling (Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law). L'un et l'autre parlent d'un concept initialement formel et matériel du Rechtsstaat, érigeant la liberté en fin suprême de l'Etat, et de son évolution ultérieure vers un concept formel, réduit à l'exigence du respect de la simple légalité. Efectivement, comme Böckenförde l'a montré, l'inspiration kantienne du concept initial de Rechtsstaat interdit de le qualifier de matériel exclusivement (cf. infra).

[10] Herrera, Quelques remarques à propos de la notion d'Etat de droit, 91 ; D. von der Pfordten, Zur Frage des Rechtsstaatsprinzips bei Kant mit einem Ausblick auf die Neukantianer, in C. Bouriau et J. Sohnle (dir.), La dimension kantienne de l'Etat de droit (approches juridiques et philosophiques), (Presses Universitaires de Nancy - Editions universitaires de Lorraine, 2020) 19-32., 22.

[11] Merkel, Idee und Gestalt des Rechtsstaat, 132 ; Böckenförde, Le droit, l'Etat et la constitution démocratique, 130-131 ; J.-F. Kervégan, L'État de droit dans l'idéalisme allemand : Kant, Fichte, Hegel, in O. Jouanjan (dir.), Figures de l'État de droit. Le Rechtsstaat dans l'histoire intellectuelle et constitutionnelle de l'Allemagne, (Presses universitaires de Strasbourg, 2001) 101-123., not. 114-116 ; von der Pfordten, Zur Frage des Rechtsstaatsprinzips bei Kant mit einem Ausblick auf die Neukantianer, 23-26.

[12] J. Locke, Second Treatise of Government, www.gutenberg.org/files/7370/7370-h/7370-h.htm (consulté le : 30.12.2022) ; Everyman's library, 1924, réimpr. 1986, chap. VIII, § 95-96.

[13] Ibid., chap. VIII, § 96.

[14] Ibid., chap. VIII, § 97.

[15] Ibid., chap. VIII, § 99.

[16] Ibid., chap. X, § 132-133.

[17] Ibid., chap. X, § 132-133.

[18] Ibid., chap. IX, § 124.

[19] Ibid., chap. IX, § 123-124.

[20] Ibid., chap. IX, § 123.

[21] Ibid., chap. II, § 6.

[22] Ibid., chap. II, § 6.

[23] Ibid., chap. IX, § 124.

[24] Ibid., chap. IX, § 125.

[25] Ibid., chap. IX, § 126.

[26] Ibid., chap. X, § 132 ; chap. XI, § 134-136.

[27] Ibid., chap. XI, § 137.

[28] Ibid., chap. XI, § 142.

[29] Ibid., chap. XI, § 135-136.

[30] Ibid., chap. XI, § 135 et § 142.

[31] Ibid., chap. XII, § 143-144.

[32] Ibid., chap. XVIII, § 199.

[33] Ibid., chap. VIII, § 99 : le contrat social donne seul naissance à un lawful government ; chap. XVIII, § 199 : « tyranny is [...] When the governor, however entitled, makes not the law, but his will, the rule [...] ». A contrario, le gouvernement prôné par Locke est donc celui où prévaut the rule of law ; Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 13.

[34] Kant intitule bien Das Staatsrecht une section de la seconde partie de sa Doctrine du droit consacrée au droit public. Mais la notion de Staatsrecht (« droit de l'Etat », en d'autres termes droit politique), ne doit évidemment pas être confondue avec celle de Rechtsstaat. Kant utilise aussi l'expression rechtlicher Zustand (état juridique), par opposition à natürlicher Zustand (état naturel) : cf. infra : texte. Mais Zustand signifie l'état au sens d'une situation, et non l'Etat au sens d'une communauté politique organisée. Il ne faut donc pas confondre Rechtlicher Zustand et Rechtsstaat (Herrera, Quelques remarques à propos de la notion d'Etat de droit, 93-94.).

[35] I. Kant, Metaphysische Anfangsgründe der Rechtslehre [MS] ; AA (Akademie-Ausgabe, 2ème éd.) 06: 313.14 ; trad. française A. Philonenko, sous le titre abrégé E. Kant, Doctrine du droit, 2ème éd., (Vrin, 1979) § 45, 195 ; Zum ewigen Frieden (Vers la paix perpétuelle) [ZeF], AA 08: 351.01-03 ; texte et trad. J. Darbellay, 2ème éd., (PUF, 1974) 92-93.

[36] Montesquieu, De l'esprit des lois, chr., intr. et bibl. V. Goldschmidt, (Garnier-Flammarion, 1979) vol. I, livre XI, chap. VI, 294 et suiv. Locke (Second treatise of government, chap. XII, § 143 et suiv.) distinguait, quant à lui, le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir fédératif, sans ériger la justice en troisième pouvoir, contrairement à ce que feront Montesquieu, puis Kant.

[37] MS, AA 06: 313.14f (§ 45 et suiv.) ; trad. Philonenko, 195 et suiv. ; ZeF, AA 08: 352.14-15, texte et trad. Darbellay, 94-95 ; S. Goyard-Fabre, La philosophie du droit de Kant, (Vrin, 1996) 179 et suiv. ; Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 54 et suiv.

[38] Montesquieu, De l'esprit des lois, vol. I, livre XI, chap. VI, 302 ; Goyard-Fabre, La philosophie du droit de Kant, 181 et suiv.

[39] MS, AA 06: 316.08-16 (§ 48) ; trad. Philonenko, 198.

[40] MS, AA 06: 318.06-07 (§ 49) ; trad. Philonenko, 200.

[41] I. Kant, Über den Gemeinspruch: Das mag in der Theorie richtig sein, taugt aber nicht für die Praxis [TP], Vom Verhältnis der Theorie zur Praxis im Staatsrecht - Gegen Hobbes), AA 08: 290.33-37 - 291.0104 ; trad. L. Guillermit sous le titre, Sur l'expression courante : il se peut que ce soit juste en théorie, mais en pratique cela ne vaut rien, 4ème éd., (Vrin, 1980) « Du rapport de la théorie à la pratique dans le droit de l'Etat - contre Hobbes », 31 ; dans un sens similaire : MS, AA 06: 318.08-11 (§ 49) ; trad. Philonenko, 200.

[42] MS, AA 06: 318.12-14 (§ 49, in fine) ; trad. Philonenko, 200 ; dans le même sens : TP, AA 08: 289.21 ; trad. Gibelin, 29 ; I. Kant, Der Streit der Fakultäten [SF], zweiter Abschnitt : Der Streit der philosophischen Facultät mit der juristischen, AA 07: 087.05-08 ; 091.11-12 ; trad. J. Gibelin sous le titre Le conflit des facultés, (Vrin, Paris, 1973) 2ème section, « Le conflit de la faculté de philosophie avec la faculté de droit », 104 et 108. Rappelons que, chez Kant, du moins dans le dernier état de sa pensée, lorsqu'il en a élargi le concept (MS, AA 06: 222.15-20 ; trad. Philonenko, 96), l'impératif catégorique se définit comme une règle pratique, dont la représentation rend une action objective et nécessaire de manière inconditionnelle, par sa forme et non par la représentation d'une fin matérielle et empirique qui en serait la conséquence, tel le bonheur. Les autres impératifs sont hypothétiques ou techniques, parce qu'ils sont conditionnés par la poursuite d'une fin empirique.

[43] TP, AA 08: 289.21 - 290.24 ; 297.02-03 ; trad. Gibelin, 29-30 et 38-39.

[44] ZeF, AA 08:349.08 - 351.03 ; texte et trad. Darbellay, 90-93 ; SF, AA 07: 088.02-03 ; 091.14 ; trad. Gibelin, 104 et 109.

[45] Böckenförde, Le droit, l'Etat et la constitution démocratique, 131 ; Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 39.

[46] MS, AA 06: 313.17-22 (§ 45) ; trad. Philonenko, 195 ; MS, AA 06: 318.12-14 (§ 46) ; trad. Philonenko, 196.

[47] MS, AA 06: 317.19-36 (§ 49) ; trad. Philonenko, 200.

[48] MS, AA 06: 313.29 - 314.03 (§ 46) ; trad. Philonenko, 196.

[49] Ibid.

[50] Ibid.

[51] ZeF, AA 08:351.21 - 353.15 ; texte et trad. Darbellay, 94-97 ; MS, AA 06: 341.09-22 (§ 52) ; trad. Philonenko, 224.

[52] MS, AA 06: 315.30 - 316.06 (§ 47) ; trad. Philonenko, 198.

[53] TP, AA 08: 297.08-15 ; trad. Gibelin, 39 ; MS, AA 06: 312.02-21 (§ 44) ; trad. Philonenko, 194 ; MS, AA 06: 319.09 ; trad. Philonenko, 201.

[54] TP, AA 08: 298.01-07 ; trad. Gibelin, 40 ; MS, AA 06: 319.09-11 ; trad. Philonenko, 201.

[55] MS, AA 06: 314.04-16 (§ 46) ; trad. Philonenko, 196 ; ZeF, AA 08:349.09 - 350.01 ; texte et trad. Darbellay, 90-91 ; comp. la présentation antérieure, un peu différente dans TP, AA 08: 290f ; trad. Gibelin, 30 et suiv. En outre, on notera que dans son essai Vers la paix perpétuelle, Kant parle d'une « dépendance de tous envers une unique législation commune » (en tant que sujets) ». Dans les deux autres ouvrages, il baptise cette condition « l'indépendance civile » et la formule comme indiquée au texte. Sur la portée de cette substitution, cf. Kervégan, L'État de droit dans l'idéalisme allemand... 110-111.

[56] Nous empruntons cette formulation précise mais abstruse du principe d'égalité civile à la Doctrine du droit. Pour d'autres formulation, cf. TP, AA 08: 291.19-24 ; trad. Gibelin, 32 ; ZeF, AA 08:349, apud notam ; trad. Darbellay, 90-91, note.

[57] I. Kant, Kritik der reinen Vernunft, [KrV], AA 03: 247.29 - 248.02 ; trad. et prés. A. Renault, GarnierFlammarion, 2006, « Dialectique transcendantale » 344.

[58] MS, AA 06: 340.31 - 341.02 (§ 52) ; trad. Philonenko, 224. Rappr. Böckenförde, Entstehung und Wandel der Rechtsstaatsbegriff, 146-147.

[59] Merkel, Idee und Gestalt des Rechtsstaat, 133-134 ; Böckenförde, Le droit, l'Etat et la constitution démocratique, 127 et suiv. ; Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 31 et suiv. ; Herrera, Quelques remarques à propos de la notion d'Etat de droit, 91 et suiv. ; C. Husson-Rochcongar, La redéfinition permanente de l'Etat de droit par la Cour européenne des droits de l'homme, (2016) 37 (2) Civitas Europa, 183-220, 187 et suiv. ; Chevallier, L'Etat de droit, 16 et suiv. ; adde : J. Carbonnier, Droit civil, vol. 1, (PUF, coll. Quadrige, 2004) n° 41-42.

[60] R. von Mohl, Die Polizei-Wissenschaft nach den Grundsätzen des Rechtsstaates (1832), 3e éd., (Tübingen, 1866) L I, 4 et s. et 324, cité par Herrera, Quelques remarques à propos de la notion d'Etat de droit, 91 ; Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 33.

[61] C.-T. Welcker, Die letzen Gründe von Recht, Staat und Strafe. Philosophisch und nach den Gesetzen der merkwürdigsten Völker rechtshistorisch entwickelt, (Giessen, 1813) 25, cité par Herrera, Quelques remarques à propos de la notion d'Etat de droit, 91 ; Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 33.

[62] J.-C.-F. von Aretin, Staatsrecht der constitutionelen Monarchie, t. I, (Altenburg, 1824) 163, cité par Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 34.

[63] Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 43, n° 52 et suiv., n° 63 ; Herrera, Quelques remarques à propos de la notion d'Etat de droit, 91-92.

[64] Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 159 et suiv., n° 214 et suiv.

[65] W. Friedmann, Legal theory, 5ème édition, (Columbia University Press, 1967) 422 et suiv. ; Herrera, Quelques remarques à propos de la notion d'Etat de droit, 89-103.

[66] Merkel, Idee und Gestalt des Rechtsstaat, 134-135 ; Böckenförde, Le droit, l'Etat et la constitution démocratique, 133 et suiv. ; Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 67 et suiv. ; Herrera, Quelques remarques à propos de la notion d'Etat de droit, 91 et suiv. ; Husson-Rochcongar, La redéfinition permanente de l'Etat de droit par la Cour européenne des droits de l'homme, 183-220., https://doi.org/10.3917/civit.037.0183 ; Chevallier, L'Etat de droit, 16 et suiv. ; Carbonnier, Droit civil, vol. 1, n° 41-42.

[67] F.-J. Stahl, Die Philosophie des Rechts, (J. C. B. Mohr, Heidelberg, 1878) t. II, Die Staatslehre und die Principien des Staatsrechts, 218 et suiv.

[68] Merkel, Idee und Gestalt des Rechtsstaat, 135 ; Böckenförde, Le droit, l'Etat et la constitution démocratique, 133 et suiv. ; Ch. Schönberger, Etat de droit et Etat conservateur : Friedrich Julius Stahl, in Jouanjan (dir.), Figures de l'Etat de droit, 177-191 ; Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 91 et suiv. ; Chevallier, L'Etat de droit, 17.

[69] Die Gesetzgebung ist an die verfassungsmäßige Ordnung, die vollziehende Gewalt und die Rechtsprechung sind an Gesetz und Recht gebunden : « Le pouvoir législatif est lié à l'ordre constitutionnel, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire à la loi et au droit. »

[70] Merkel, Idee und Gestalt des Rechtsstaat, 135-136 ; Böckenförde, Entstehung und Wandel der Rechtsstaatsbegriff, 143-145 ; Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 149 et suiv. ; M. Fromont, Les droits fondamentaux dans l'ordre juridique de la République Fédérale d'Allemagne, in Recueil d'études en hommage à Charles Eisenmann, (Cujas, Paris, 1975) 49-64., not. 49-50. et 64 ; A. Bleckmann, L'Etat de droit dans la constitution de la République fédérale d'Allemagne, Pouvoirs, n° 22, septembre 1982, 5-28 ; C. Grewe, L'Etat de droit sous l'empire de la Loi fondamentale, in Jouanjan (dir.), Figures de l'Etat de droit, 385-393, spéc. 392-393 ; R. Déchaux, La notion d'État de droit en Allemagne : le Rechtsstaat, Rencontres l'axe 3 de l'UMR 7318 DICE, Démocratie, État de droit et droits fondamentaux, Avril 2021, Aix-en-Provence, France. Ffhal-03214090.

[71] Rzeczpospolita Polska jest demokratycznym państwem prawnym, urzeczywistniającym zasady sprawiedliwości społecznej : « La République de Pologne est un Etat démocratique de droit, mettant en æuvre les principes de justice sociale. »

[72] « l'Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d'égalité, de l'État de droit, ainsi que de respect des droits de l'Homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités. »

[73] Cf. par ex CJUE 16 février 2022, affaire C-157/21, République de Pologne c/ Parlement européen et conseil de l'union européenne, § 154.

[74] Husson-Rochcongar, La redéfinition permanente de l'Etat de droit par la Cour européenne des droits de l'homme, 189 et suiv. Cf. par ex. CEDH 7 mai 2021, Xero Flor w Polsce sp. zo.o. c/ Pologne, § 247.

[75] G. Jellinek, Die rechtliche Natur der Staatenverträge (Ein Beitrag zur juristischen Construction des Völkerrechts), (Vienne, 1880) 7 et suiv. ; Allgemeine Staatslehre, 3ème éd., (Berlin, 1914) 367 et suiv. ; trad. G. Fardis, L'état moderne et son droit, 1re partie, Théorie générale de l'Etat, (Paris, 1911) 549 et suiv. Cf. Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 97 et suiv. ; W. Pauly, Le droit subjectif dans la doctrine des statuts de Georg Jellinek, in Jouanjan (dir.), Figures de l'Etat de droit, 293-312., 297-298. Pour la critique de la doctrine de Jellinek, cf. M. La Torre, Science juridique et Etat de droit - Leonard Nelson et Georg Jellinek, in Jouanjan, Figures de l'Etat de droit, 313-330., 318-322.

[76] Chevallier, L'Etat de droit, 22 ; Rivero, L'Etat moderne peut-il encore être un Etat de droit ? 73 et suiv.

[77] A. L. Duguit, Traité de droit constitutionnel, t. III, (E. de Boccart, 1930) 589 et suiv., not. 592 et suiv.

[78] Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 393 et suiv. ; Chevallier, L'Etat de droit, 34 et suiv. Sur les rapports des notions d'Etat de droit et de droit naturel, cf. infra.

[79] Chevallier, L'Etat de droit, 40 et suiv. ; C. Herrera, Hans Kelsen et le concept d'Etat de droit, in Bouriau et J. Sohnle (dir.), La dimension kantienne de l'Etat de droit, (Presses Universitaires de Nancy - Editions universitaires de Lorraine, 2020) 101-118.

[80] H. Kelsen, Reine Rechtslehre, 2ème éd., (Mohr Siebeck, 2017) 501 et suiv. ; trad. Ch. Eisenmann sous le titre Théorie pure du droit, (Dalloz, 1962) 378 et suiv., https://doi.org/10.1628/978-3-16-156464-2

[81] Kelsen, Reine Rechtslehre, 398 et suiv. ; trad. Eisenmann, 299 et suiv.

[82] Kelsen, Reine Rechtslehre, 383 et suiv. ; trad. Eisenmann, 286 et suiv. ; Friedmann, Legal theory, 275 et suiv.; Carbonnier, Droit civil, vol. 1, n° 39, 75 et n° 42, 78.

[83] Kelsen, Reine Rechtslehre, 543 ; trad. Eisenmann, 411.

[84] Herrera, Quelques remarques à propos de la notion d'Etat de droit, 98 ; « Hans Kelsen et le concept d'Etat de droit », 115.

[85] Kelsen, Reine Rechtslehre, 544 ; trad. Eisenmann, 411. Dans le même sens : Troper, La théorie du droit, le droit, l'Etat, 281.

[86] Kelsen, Reine Rechtslehre, 544 ; trad. Eisenmann, 411 ; du même auteur « Gott und Staat », in Hans R. Klecatsky, Renè Marcic, Herbert Schambeck (ed), Die Wiener rechtstheoretische Schule. Schriften von Hans Kelsen, Adolf Merkl, Alfred Verdross (Franz Steiner Verlag, 2010) 261-284, 270-274.

[87] Kelsen, Reine Rechtslehre, 551 et suiv. ; trad. Eisenmann, 417 et suiv. ; du même auteur, Théorie générale du droit et de l'Etat, trad. B. Laroche et V. Faure, intr. Stanley L. Paulson, Bruylant et LGDJ, 1997, 251-252 ; « Gott und Staat », 275-276. Cf. Pauly, Le droit subjectif dans la doctrine des statuts de Georg Jellinek, 299.

[88] Kelsen, Reine Rechtslehre, 544 ; trad. Eisenmann, 411.

[89] Kelsen, Reine Rechtslehre, 21 et 128 et suiv. ; trad. Eisenmann, 1 et 87 et suiv. ; Théorie générale du droit et de l'Etat, 55 et suiv. Rappr. Merkel, Idee und Gestalt des Rechtsstaat, 138 : Rechtsstaat ist der Staat, der sich irgendwie selbst verneint (« l'Etat de droit est l'Etat qui, d'une certaine manière, se nie lui-même » ; W. Leisner, L'Etat de droit - une contradiction?, in Recueil d'études en hommage à Charles Eisenmann, (Cujas, Paris, 1975) 65-79, spéc. 78-79. Pour une analyse critique du normativisme kelsénien, en ce qu'il prône de faire complètement abstraction du contenu des normes et des valeurs, cf. not. Friedmann, Legal theory, 283 et suiv. ; H. Batiffol, Problèmes de base de philosophie du droit, (LGDJ, 1979) 54 et suiv.

[90] KrV, AA 03: 099.15-29 ; trad. Renault, De la déduction des concepts pur de l'entendement, 169-170.

[91] Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 441 et suiv. (développements très complets).

[92] Cf. par ex. Carbonnier, Droit civil, t. I, n° 38-39, 74 ; Batiffol, Problèmes de base de philosophie du droit, 16.

[93] Sur lesquelles, cf. Carbonnier, Droit civil, t. I, n° 38-41 ; Friedmann, Legal theory, 153 et suiv. ; H. L. A. Hart, Le concept de droit, trad. M. van de Kerchove, (Facultés universitaires Saint-Louis, 1976) 113 et suiv.; du même auteur Positivism and the Separation of Law and Morale, (1958) 71 Harvard Law Review, 593 et suiv., https://doi.org/10.1307/1338115 ; Batiffol, Problèmes de base de philosophie du droit, 16 et suiv. ; N. Bobbio, Essais de théorie du droit, trad. M. Guéret avec la collaboration de Ch. Agostini, (Bruylant & LGDJ, 1998) 13 et suiv., 39 et suiv. ; M. Tropper, Pour une théorie juridique de l'Etat, (PUF, coll. Léviathan, 1994) 13 et suiv., https://doi.org/10.3917/puf.trope.1994.01

[94] Cf. par ex. Friedmann, Legal theory, 157 ; Batiffol, Problèmes de base de philosophie du droit, 54 et suiv. ; Kelsen, La doctrine du droit naturel et le positivisme juridique, appendice à Théorie générale du droit et de l'Etat, 435 et suiv., spéc. 438-441.

[95] MS, AA 06: 119.11-15 (Einleitung in die Rechtslehre, § A) ; trad. Philonenko, 103 ; MS, AA 06: 137.1517 (Eintheilung der Rechtslehre, B,1) ; trad. Philonenko, 111 ; MS, AA 06: 156.11-15 (§ 9) ; trad. Philonenko, 131 ; MS, AA 06: 196.16-17 (§ 36) ; trad. Philonenko, 178 ; Goyard-Fabre, La philosophie du droit de Kant, 69 ; du même auteur, Les embarras philosophiques du droit naturel, (Vrin, 1003) 113 et suiv.

[96] MS, AA 06: 313.11-14 § 45) ; trad. Philonenko, 195. Cf. supra. Dans le langage de Kant, les termes « pur » et « a priori » se recoupent la plupart du temps : cf. par ex. MS, AA 06: 205.10-12, 25-26 (Vorrede); trad. Philonenko, 79.

[97] SF, AA 07: 087.13 ; trad. Gibelin, 104.

[98] SF, AA 07: 090.21-22 ; trad. Gibelin, 108 ; Goyard-Fabre, La philosophie du droit de Kant, 41 ; Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 42 ; Chevallier, L'Etat de droit, 19-20.

[99] Héraclite, Fragm. Diels et Kranz, Die Fragmente der Vorsokratiker, B 114, Pradeau, n° 119 ; Platon, Gorgias, texte et trad. M. Croiset, collab. L. Bodin (1941), Les Belles Lettres, 1998, 508 a ; trad. et notes L. Robin (1940), préf. J. Brunschwig, prés. A. Castel-Bouchouchi, Folio, 1999 ; trad. M. Canto-Sperber, Garnier-Flammarion, 2018 ; Platon, Les Lois, X, 890 d.

[100] H. Grotius, Le droit de la guerre et de la paix, trad. du latin P. Pradié-Fodéré, éd. D. Allan et S. Goyard-Fabre, (PUF, coll. Léviathan, 1999) prolégomènes, § XI-XII ; livre I, chap. I, § X, 1.

[101] Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 36.

[102] S. Pufendorf, Le droit de la nature et des gens, trad. du latin J. Barbeyrac, (Bâle, 1732) t. II, livre VIII, chap. I, § I-II, 352-354.

[103] H. Wolff, Principes du droit de la nature et des gens, trad. du latin J.-H.S. Formey, (Amsterdam, 1758) t. III, livre VIII, chap. V, § VI et suiv., 243 et suiv. ; chap. VI, § XVII, 251.

[104] Heuschling, Etat de droit, Rechtsstaat, Rule of Law, n° 28 et suiv.

[105] Grotius, Le droit de la guerre et de lapaix, livre I, chap. I, § X, 1, 5, 6 ; § XII, 1 ; Pufendorf, Le droit de la nature et des gens, t. I, livre II, chap. III, § 1, 169 ; t. II, livre VIII, chap. I, § 1, 353 ; E. Cassirer, La philosophie des lumières, trad. et prés. P. Quillet, Gérard Montfort, (réimpr. 1982) 241-245.

[106] Grotius, Le droit de la guerre et de la paix, Prolégomènes, § LVIII ; Pufendorf, Le droit de la nature et des gens, t. II, livre VIII, chap. I, § I-II, 352-354 ; Wolff, Principes du droit de la nature et des gens, t. I, livre I, chap. I, § III, 2 ; Cassirer, La philosophie des lumières, 242.

[107] Grotius, Le droit de la guerre et de la paix, livre I, chap. I, § IX, 2 ; § XIII.

[108] I. Kant, Kritik der praktischen Vernunft [KpV] (Critique de la raison pratique), AA 05: 071.28-34 ; 081.15-19 ; trad. F. Picavet, 7ème éd., (PUF, 1976) 75 et 85 ; Die Religion innerhalb der Grenzen der bloßen Vernunft (La religion dans les limites de la simple raison), AA 06: 098.30 - 099.03 ; trad. et avant-propos J. Gibelin, 6ème éd., (Vrin, Paris, 1979) 133 ; SF, AA 07: 091.22-25 ; trad. Gibelin, 109 ; MS, AA 06: 219.09-14 ; trad. Philonenko, 93.

[109] KpV, AA 05: 081 13-15 ; trad. Picavet, 85.

[110] Goyard-Fabre, La philosophie du droit de Kant, 57 et suiv. ; Les embarras philosophiques du droit naturel, 111.

[111] MS, AA 06: 219.10-14 (Einleitung in die Metaphysik der Sitten) ; trad. Philonenko, 93 ; MS, AA 06: 230.17-18; 29-31 (Einleitung in die Rechtslehre, § C) ; trad. Philonenko, 105.

[112] Sur cet aspect fondamental, dont l'exposé suit, de la philosophie du droit de Kant, cf. not. Goyard-Fabre, La philosophie du droit de Kant, 112 et suiv. ; A. Renault, « Présentation » de Kant, Métaphysique de mæurs, t. I, (Garnier-Flammarion, 1994) 37 et suiv. ; M. Villey, La Rechtslehre de Kant dans l'histoire de la science juridique, in du même, Critique de la pensée juridique moderne (douze autres essais), (Dalloz, 1976, réimpr. 2009) 139-159., not. 154-155 ; adde : Chevallier, L'Etat de droit, 19-20.

[113] MS, AA 06: 215.16-18 (Einleitung in die Metaphysik der Sitten) ; trad. Philonenko, 89 ; MS, AA 06: 229.17 - 230.04 (Einleitung in die Rechtslehre, § B) ; trad. Philonenko, 103-104.

[114] TP, AA 08: 306.17 ; trad. Gibelin, 50.

[115] MS, AA 06: 230.24-26 (§ B, in fine) ; trad. Philonenko, 104 ; TP, AA 08: 289.35 - 290.02 ; trad. Gibelin, 30.

[116] MS, AA 06: 231.23-34 (§ D) ; trad. Philonenko, 105-106 ; TP, AA 08: 290.04-08 ; trad. Gibelin, 30.

[117] MS, AA 06: 232.09-11 (§ e) ; trad. Philonenko, 106.

[118] MS, AA 06: 307.12 - 308.02 (§ 42); trad. Philonenko, 189; AA 06: 312.02-15 (§ 44); trad. Philonenko, 194-195.

[119] MS, AA 06: 242.15-17; trad. Philonenko, 116.

[120] MS, AA 06: 256.35 - 257.04 (§ 9) ; trad. Philonenko, 131; AA 06: 257.30 (§ 9, rem.); trad. Philonenko, 132; AA 06: 312.34 - 313.08 (§ 44); trad. Philonenko, 195. Rappr. Pufendorf, Le droit de la nature et desgens, livre III, chap. I, § III, 3, 355-356.

[121] MS, AA 06: 257.04-05 (§ 9); trad. Philonenko, 131.

[122] MS, AA 06: 242.18-19; trad. Philonenko, 116; AA 06: 311.06-08 (§ 43); trad. Philonenko, 193.

[123] MS, AA 06: 341.01-04 (§ 52); trad. Philonenko, 224.

[124] MS, AA 06: 256.26-31 (§ 9); trad. Philonenko, 131; AA 06: 312.17-21 (§ 44); trad. Philonenko, 194; AA 06: 312.34 - 313.08 (§ 44, rem.); trad. Philonenko, 195.

[125] MS, AA 06: 340.36-37 (§ 52); trad. Philonenko, 224.

[126] J. Locke, An essai concerning human understanding, pref. et ed. P. H. Niddish, (Clarendon Press Oxford, 1985) livre I, chap. III, § 13.

[127] Locke, Second treatise of civil government, VIII, § 100 et suiv.

[128] Ibid., § 112.

[129] Ibid., § 103.

[130] Ibid., § 102.

[131] TP, AA 08: 306.18-19 ; trad. Gibelin, 50.

[132] Kervégan, L'État de droit dans l'idéalisme allemand... 114.

[133] ZeF, AA 08: 380.32-33 ; trad. Darbellay, 154-155.

[134] MS, AA 06: 371.33-34 : das Ding an sich selbst ; trad. Philonenko, 255.

[135] SF, AA 07: 091.03-05 ; trad. Gibelin, 108. Cf. déjà : KrV, AA 03: 247.21-29.

[136] Malgré l'admiration qu'il porte à Platon, Kant n'entend évidemment pas suggérer par ces expressions que l'Etat idéal aurait les caractéristiques de celui de la République. L'Etat idéal kantien est fondé sur la liberté, L'Etat idéal platonicien est régime autoritaire, dans lequel l'autonomie du citoyen est niée.

[137] SF, AA 07: 084f ; trad. Gibelin, 99 et suiv. spéc. 109-110.

[138] Ibid.; I. Kant, Idee zu einer allgemeinen Geschichte in weltbürgerlicher Absicht - Funfter Satz, AA 08: 22.06-35 ; trad. ss le titre E. Kant, Idée d'une histoire universelle au point de vue cosmopolitique et com. J.-M. Muglioni, Bordas Editions pédagogiques modernes, 1981, 5ème proposition, 16-17.

[139] Carbonnier, Droit civil, t. I, n° 38.

[140] Platon, Tbéétète, texte et trad. A. Diès, (Les Belles Lettres, 1923, nouveau tirage 1976), trad. M. Narcy, Garnier-Flammarion, 167 c, 172 a.

[141] Antiphon, Discours suivis des fragments d'Antiphon le Sophiste, texte et trad. L. Gernet, (Belles Lettres, 1923, réimpr. 2018) 4 ; fragm. H. A. Diels et W. Kranz, Die Fragmente der Vorsokratiker, B 44.

[142] M. Villey, Philosophie du droit - Définitions et fins du droit - Les moyens du droit, (Dalloz, réimpr. 2001) n° 10 et suiv.

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[1] L'auteur est Maître de conférences en droit privé à l'Université Paris Panthéon-Assas.

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